Les mille maux de la filière nucléaire : corrosions, soudures défaillantes, fretting, etc.

revue des mille maux qui touchent les réacteurs nucléaires donnant à voir l'incapacité de l'exploitant à les entretenir et à construire de nouveaux

SÛRETÉ NUCLÉAIRE

Guillaume Blavette

7/4/202228 min read

Et si on parlait corrosion…

L’affaire n’est pas récente. Elle a été révélée à la fin de l’année dernière. « Au cours de l’arrêt décennal du réacteur n° 1 de la centrale nucléaire de Civaux, qui a débuté le 21 août 2021, EDF a procédé à un contrôle par ultrasons de plusieurs soudures du circuit d’injection de sécurité (RIS), conformément au programme de maintenance préventive en vigueur . » Mais il faut attendre le 16 décembre 2021 pour que l’ASN et l’IRSN communique sur ce nouvel « écart » de la filière nucléaire :

« Le 21 octobre 2021, à la suite de contrôles par ultrasons réalisés au titre de la visite décennale du réacteur 1 de la centrale nucléaire de Civaux, EDF a informé l’ASN de la détection d’indications sur des soudures des coudes de la tuyauterie raccordant le système d’injection de sécurité au circuit primaire principal du réacteur (voir image ci-après). Afin d’identifier l’origine de ces indications, les parties de tuyauteries concernées ont été découpées pour expertise métallurgique en laboratoire . »

Il aura donc fallu 3 mois pour que le Gendarme du nucléaire intervienne après la présentation d’investigations complémentaires réalisées par l’exploitant …

« Au regard de l’origine inattendue des fissurations constatées, EDF a pris la décision de mettre à l’arrêt, dans les meilleurs délais, les réacteurs de conception similaire. Les réacteurs B1 et B2 de la centrale nucléaire de Chooz seront ainsi prochainement arrêtés afin de réaliser des contrôles complémentaires à ceux réalisés en 2019 et 2020 lors de leur visite décennale.

L'ASN considère que cette décision, prise par EDF en tant que premier responsable de la sûreté, est appropriée à la situation.

L’ASN, avec l’appui technique de l’IRSN, suit avec attention les investigations menées par EDF et les conclusions qui en seront tirées, notamment vis-à-vis du suivi en service sur ces équipements. L’ASN autorise les interventions sur les équipements concernés et se prononcera sur leur remise en service. »

Immédiatement la presse donne un large écho à cet affaire qui survient quelques mois après la « crise » des combustibles parties de Taïshan en Chine . Mais c’est à un tout autre niveau que le problème éclate. Les marchés financiers n’apprécient guère les mésaventures d’EDF , alors que d’aucuns commencent à douter de la sécurité des approvisionnements sans que RTE ne les rassure …

Ça pouvait tenir sauf que « les emmerdes volent en escadrilles ». L’ensemble de la filière nucléaire est gagné par des problèmes de corrosion. Une semaine avant la révélation des corrosions sous contraintes à Civaux, c’est l’usine de La Hague qui a dû mettre des installations à l’arrêt face à des problèmes du même ordre. La rouille est une lime sourde qui ronge l’ensemble du parc atomique en dépit de tous les artifices déployés par les exploitants pour le dissimuler depuis tant d’années…

Une contrainte jamais surmontée

Certains découvrent aujourd’hui l’eau tiède constatant que la corrosion est présente dans les installations nucléaires . Il ne faut pourtant pas être grand clerc pour deviner que la rouille est présente un peu partout dans des installations où l’eau coule un peu partout d’autant plus qu’elles sont soumises à des conditions d’exploitations plutôt impactantes (chaleur, pression, chimie, radioactivité, « corps étrangers », etc.)

Comme l’explique Thierry Gadault, les fameuses corrosions sous contraintes ne sont pas nouvelles. Une note du CEA pour le Congrès nucléaire de Rome le montre dès 1977 . Les corrosions ou tout du moins la fragilité des équipements installés ont été identifiées dès les premières heures du parc nucléaire et n’ont pas fait l’objet d’un traitement efficient en dépit des risques que ces fragilités induisent à en croire Global Chance .

En 2010, des documents donnent à voir la faiblesse d’éléments du couvercle de cuve de l’EPR . Tant le choix des matériaux que leur assemblage par des soudures trop nombreuses inquiètent. Le matériau choisi, un acier inoxydable de type « martensitique », ne présente pas toutes les garanties de sûreté qu’on est en droit d’attendre pour un équipement du circuit primaire :

« Or, « des constats (...) de fragilisations et de ruptures brutales de tiges de vannes en aciers inoxydables martensitiques » (§ III.1) ont été constatés au début des années 1990. C'est pourquoi « l’utilisation de ce type d’acier a toujours été proscrite sur le Parc [de réacteur] pour les parties soumises à pression du CPP [Circuit primaire principal]. Son utilisation pour les mécanismes EPR a donc été remise en question, d’autant plus que cet acier ne satisfait pas au critère ESPN stipulant que le rapport entre la limite d’élasticité et la résistance à la traction doit être inférieur à 0,85. Cependant, ses propriétés magnétiques ont rendu impossible son remplacement (§5.4) . »

La capacité des équipements sous pression à faire face à tous les types de situation suscitent de vives interrogations au-delà même du mouvement antinucléaire. C’est bien la robustesse des installations qui est en cause alors qu’il apparaît clairement que des fragilités sont présentes dès la construction… et que le vieillissement n’arrange rien.

« Comme dans toute installation industrielle, les matériaux composant une centrale nucléaire vieillissent et leurs propriétés se détériorent au fur et à mesure du fonctionnement de la centrale, suite aux sollicitations multiples auxquelles les composants sont soumis. Les facteurs qui influencent le plus les processus de vieillissement dans une centrale nucléaire sont l’irradiation nucléaire, les contraintes thermiques ou mécaniques, les processus corrosifs, abrasifs et érosifs, ainsi que les combinaisons et les interactions des processus précités (Meyer, 1998). »

En 2012 une alerte concerne les cuves des réacteurs après la découverte à Doel en Belgique de fissures . L’affaire fait grand bruit de ce côté ci du Quiévrain dans la mesure où les centrales françaises sont loin d’être épargnées par la dégradation des cuves de l’aveu même de l’IRSN . On parle alors de « défauts sous revêtement » pour ne pas à avoir à utiliser le mot fissure. En tout cas une chose est certaine. Les matériaux n’évoluent pas comme attendu et imposent des aménagements de la conduite des réacteurs pour ménager les cuves et plus globalement les circuits primaires . Mais les défauts ne se limitent pas au seul corps de la cuve. Comme sur l’EPR, « Des dégradations en service par corrosion sous contrainte sont apparues par le passé sur quelques traversées (tubes adaptateurs) de couvercles de cuves . »

Le problème est suffisamment sérieux pour attirer l’attention du Parlement européen en 2013 qui s’inquiète des effets des circuits et autres équipements corrodés sur les opérations de démantèlement à venir . En 2014, la corrosion des aciers ferritiques dans les centrales suscitent de nombreuses publications . Les experts du nucléaire identifient le problème mais sont incapables de le résoudre…

Le plus drôle est que plus on cherche plus on découvre de dégradations au point qu’en 2014, le bureau Veritas, organisme de contrôle et de certification qui travaille pour EDF, propose de mettre en œuvre un programme spécifique d’identification et de résolution des « écarts » . Dans un rapport établi par l’IRSN la même année dans un rapport relatif aux différents types de réacteurs de 4e génération, la corrosion apparaît comme un défi majeur. Le document ne présente pas moins de 74 occurrences insistant sur les conséquences sur l’environnement et surtout la nécessité de concevoir de nouveaux matériaux qui résistent dans la durée à des contraintes notables . Tout ça est suffisamment préoccupant pour que certains commencent à s’interroger sur l’avenir du nucléaire français 40 ans après le plan Mesmer …

Des défauts qui touchent l’ensemble des composants

L’année 2014 est décidément riche en révélation. Au moment même où le plus grand nombre prend conscience de la dégradation précoce des équipements sous pression, Mediapart publie un article retentissant sur la corrosion des gaines de combustibles :

« Selon Médiapart, un problème de corrosion concernerait des gaines de combustibles dans 25 des 58 réacteurs nucléaires, soit 13 tranches de 1300 mégawatts (MW) parmi les plus puissantes, et 12 de 900 MW parmi les plus anciennes. À partir d’une série de documents internes vérifiés, il existerait un problème de corrosion sur le gainage en Zircaloy, un alliage métallique à base de zirconium.

La question n’est pas nouvelle puisque l’IRSN avait déjà estimé que les épaisseurs maximales de corrosion étaient sous-évaluées par EDF. En 2011, elles atteignaient 115 microns, soit 0,115 millimètre alors que l’ASN estime que le risque de rupture existe dès 0,08 millimètre (80 microns) de corrosion.

Aujourd’hui, la corrosion est encore plus profonde et EDF se bat pour faire monter la tolérance de 0,08 à 0,108. Rappelons que cette corrosion représente entre un cinquième et un sixième de l’épaisseur complète de la gaine, ce qui est considérable. De plus, en cas d’accident cette corrosion pourrait avoir un effet accélérateur, d’où l’exigence de l’Autorité de Sûreté Nucléaire d’une démonstration de sûreté “acceptable”. Ceci signifie que non seulement, il existe un accroissement du risque dès aujourd’hui mais que la prolongation de vie des centrales sans le retrait de toutes les gaines de Zyrcaloy est un risque majeur. »

EDF est clairement pris en défaut alors qu’il apparaît clairement que les choix de l’exploitant été déterminés principalement pour des motifs économiques reléguant la sûreté au second plan . Il n’en reste pas moins que le problème est réel et sérieux au point d’amener l’IRSN à recommander la mise en œuvre de mesures compensatoires pour éviter des éjections de grappe et autres petits désagréments … Une fois n’est pas coutume, l’Autorité de contrôle suit et publie en juillet 2014 un courrier de position pour le moins sévère .

Force est de reconnaître que le « noyau dur » requis après la catastrophe de Fukushima vole en éclat au vu du manque de robustesse de bien des équipements et autres composants rongés par la rouille. L’Autorité de contrôle elle-même le reconnait sans le dire explicitement. Début 2014, elle décide donc de compléter ses demandes au titre du noyau dur en usant des moyens qui sont à sa disposition. Au prétexte de garantir la tenue des installations face aux risques sismiques et inondation, elle relève les règles de conception pour certains équipements . Rien n’est plus fragile en effet qu’un matériel mal assemblé ou qu’une soudure imparfaite. Une chose est certaine la lutte est engagée entre le gendarme du nucléaire et l’exploitant pour résoudre les innombrables écarts et malfaçons que l’on observe un peu partout.

Une cuve qui cache la forêt

Mais l’industrie nucléaire n’avait pas encore livrée tous ses petits secrets. L’année 2015 vient ajouter un élément réel et sérieux aux doutes que l’on peut légitimement avoir sur la robustesse des installations. En avril, l’Autorité de contrôle révèle que la cuve de l’EPR de Flamanville présente quelques anomalies à sa base et en son sommet . Il ne s’agit pas d’un problème de corrosion mais il lui est intimement lié puisqu’il donne à voir une fragilité supplémentaire des équipements « importants pour la protection » de l’installation, sa sûreté et la radioprotection.

Enormément de choses ont été écrites sur cette crise de la Cuve. Non à l’EPR2 publiera une synthèse des articles rédigées sur ce sujet à l’époque, au cours de l’été. Le problème ne se limite pas à la seule cuve de l’EPR . A mesure que l’Autorité de contrôle mène ses investigations, on découvre un très grand nombre d’écarts et d’anomalies dus à des défauts de fabrication délibérément occultés . Le renforcement du droit nucléaire depuis 2012 est fatal à EDF. Non seulement la maintenance des réacteurs en exploitation est compliquée mais la qualification des équipements est plus exigeante . La boite de pandore est ouverte. Des révélations ne vont cesser de s’accumuler au fil des mois. Médiapart révèle en juin que les soupapes de sûreté du pressuriseur présentent des défauts . Si l’EPR est décidément maudit , la crise s’étend rapidement à l’ensemble du parc nucléaire en exploitation en raison d’un système de dissimulation caractérisé .

« En avril 2016, 430 dossiers de fabrication irréguliers — des dossiers « barrés » — ont été découverts dans les archives de l’usine Areva du Creusot (Saône-et-Loire), où sont forgés les gros composants en acier des réacteurs nucléaires.

Problème : certains des dossiers barrés exhumés des placards du forgeron n’affichent pas les mêmes informations que les exemplaires transmis au client et au gendarme du nucléaire... 88 de ces écarts concernent des composants de réacteurs en fonctionnement forgés entre 1965 et 2012 et 19 le futur réacteur EPR de Flamanville 3. Pour Fessenheim 2 et Gravelines 5, les aberrations sont si préoccupantes que les réacteurs sont maintenus à l’arrêt. »

Un an après la découverte des anomalies sur la cuve de l’EPR, il apparaît que l’origine du problème se situe au Creusot là où sont fabriqués les équipements des centrales nucléaires .Les doutes déjà présents sur la défense en profondeur que la filière nucléaire est sensée garantir pour faire face à un accident se trouvent considérablement accrus… avec les conséquences qu’on peut imaginer en situation accidentelle . Non seulement les « malfaçons » sur la cuve sont réelles et sérieuses mais elles sont loin d’être isolées. Selon une Greenpeace en juin 2016, une douzaine de pays sont concernés . Le forgeron nucléaire est clairement fautif et cela pour des motifs principalement économiques comme le révèle une enquête réalisée par Reporterre en 2017 .

Le constat est accablant. Très rapidement le regard de l’Autorité de contrôle se tourne vers des générateurs de vapeur. 5 centrales sont mises à l’arrêt fin 2016 pour réaliser des investigations complémentaires. La perte de compétence de la filière nucléaire est reconnue par tous . Non seulement la conception fait défaut mais les fabrications sont défaillantes.

Et pendant ce temps-là les centrales continuent de se dégrader

C’est un fait, l’industrie française ne sait pas réaliser des équipements nucléaires conformes aux nouveaux référentiels de sûreté . Mais ce n’est qu’un problème parmi tant d’autres . Alors que la crise de la cuve se conclut par une décision pour le moins bienveillante de l’Autorité de contrôle , des problèmes de corrosion refont surface .

« A certains endroits, les tuyaux sont tellement rouillés que l'épaisseur de leurs parois a diminué. « Suffisamment pour qu'en cas de séisme le risque que ces tuyaux ne puissent pas résister aux secousses soit réel », alerte Rémy Catteau, directeur chargé des équipements sous pression nucléaires à l'ASN. Or ces tuyaux transportent l'eau puisée dans une rivière ou dans la mer pour refroidir des composants essentiels qui maintiennent les réacteurs à température. « En cas de rupture de cet approvisionnement d'eau froide, des réservoirs d'eau permettent de refroidir temporairement les réacteurs, reprend l'expert. Mais si le problème dure, on peut redouter, au stade ultime, la fusion du combustible, ce qui constitue un accident nucléaire grave. »

Le problème repéré d’abord à Belleville en juin 2017 touche une vingtaine de réacteur qui pourrait être exposés à une perte de source froide . Il ne s’agit donc pas d’une fragilité anodine mais bien d’un phénomène général affectant une des principales fonctions de sûreté. Pour l’Autorité ce n’est pas un problème de vieillissement mais plutôt de défaut de maintenance . « Ces dégradations sont la conséquence de la corrosion qui a pu se développer en l'absence d'une maintenance préventive adaptée », explique le communiqué de l'ASN .

On touche donc là à un problème plus profond. La corrosion n’est jamais que la résultante d’une dégradation progressive de la surveillance et de l’entretien du parc nucléaire par l’exploitant lui-même. Près de vingt ans après la publication du Rapport prémonitoire Charpin-Dessus-Pellat , la Cour des Comptes s’inquiète de cette dérive dans son rapport annuel publié en février 2016 . Si les sages de la rue de Cambon visent plus particulièrement le « Grand Carénage », leur propos touche l’exploitation de l’ensemble du parc . Tout y est : la perte de compétence, les défauts de formation, les rigidités de l’outil industriel en amont et bien évidemment la quête éperdue du moindre coût. L’état général du parc et surtout sa capacité à durer pausent question alors que d’autres fragilités sont révélées .

Non seulement la facture est salée mais la disponibilité des réacteurs s’effondre. Fin 2016 plus du quart est à l’arrêt pour raison de maintenance . Même l’inspecteur général pour la Sûreté Nucléaire et la Radioprotection (IGSNR), François de Lastic, reconnaît l’existence d’un problème réel et sérieux impliquant un renforcement des démarches de surveillance et de maintenance . L’Autorité de contrôle partage ce point de vue et sollicite les groupes d’experts pour proposer des solutions. En janvier 2017, le COFSOH rend ainsi un rapport intitulé Pour une contribution positive de la maintenance sous-traitée à la sûreté nucléaire. Tout cela est très intéressant si ce n’est que le problème est loin de se limiter au seul recours à la sous-traitance déjà régulé par les ordonnances prises en application de la loi de transition . Les causes profondes de la dégradation du parc sont économiques et industrielles comme le donne à voir la contribution d’Yves Marignac à la commission d’enquête Brottes-Baupin en 2014 .

Anomalies et écarts s’accumulent inexorablement

Fin 2017, les doutes sur la filière nucléaire dépassent très largement les seuls milieux écologistes . La publication du livre de Thierry Gadault et Hugues Demeude début 2018 ne fait que renforcer cette défiance en dépit des dénis du lobby nucléaire .

Une fois encore les faits tranchent le débat entre partisans et adversaires de la filière électronucléaire. En février 2018, de nouvelles anomalies notables sont repérées sur le chantier de l’EPR à Flamanville . L’assemblage des équipements du circuit secondaire ne présente pas toutes les garanties de sûreté qu’EDF s’était engagé à mettre en œuvre . Un mois plus tard 150 autres soudures présentent à leur tour des « écarts » et des « anomalies » :

« Cette nouvelle anomalie dans la construction de l'EPR révèle une défaillance systématique sur le poste crucial du contrôle qualité, EDF est en train de perdre une grande partie de sa crédibilité dans sa capacité à garantir les exigences de sûreté », estime ce spécialiste critique des questions nucléaires. Car le 22 février déjà, l'exploitant nucléaire avait déclaré un premier problème de qualité affectant 66 soudures sur une autre partie du même circuit secondaire principal, une affaire toujours en cours d'instruction par le gendarme du nucléaire. Et ce problème faisait lui-même suite aux « anomalies » découvertes cette fois en 2015 dans la composition de l'acier la cuve du réacteur (qui ont conduit l'ASN à demander le remplacement du couvercle de la cuve d'ici 2024)…

Non seulement le chantier EPR subit un nouveau retard reportant la mise en service du réacteur « tête de série » sine die , mais les capacités industrielles du maitre d’ouvrage et de son principal partenaire, Framatome, sont une nouvelle fois mises en cause. Si la facture grimpe encore un peu plus , c’est la conduite du chantier qui est prise en défaut . En octobre, l’ASN demande à EDF de vérifier d’autres soudures donnant à voir que la construction de l’EPR n’a respecté ni les règles de l’art ni les engagements initiaux du porteur de projet .

Au même moment le reste du parc est lui aussi touché par un problème d’ampleur. La corrosion ronge aussi les auxiliaires nucléaires. En janvier 2018, l’Autorité contrôle classe deux événements significatifs concernant les diésels de secours niveau 2 sur l’échelle INES . Ancrages et vases d’expansion ne présentent pas toutes les garanties de résistance aux séismes requises par le référentiel de sûreté post-Fukushima. Au final, ce ne sont pas moins de 48 réacteurs qui sont touchés par ce phénomène . La réaction de l’exploitant est immédiate. Il lui faudra néanmoins une année pour réaliser toutes les opérations nécessaires sur la moitié des réacteurs touchés …

Mais rien n’y fait, pas même les critiques et réserves de plus en plus nombreuses au sein même d’EDF . L’acharnement de l’opérateur énergétique se poursuit envers et contre tout… Le déni est total. L’EPR a beau être une catastrophe industrielle et un échec commercial cuisant , la rue de Wagram fort du soutien du lobby nucléaire veut à tout prix mener le chantier à son terme tout en prolongeant le reste du parc !

L’heure est pourtant à la relance du nucléaire

On ne peut s’étonner des « bémols » rappelés par PF Chevet lors de la présentation du rapport annuel de l’ASN devant l’OPESCT le 12 avril 2018. Des anomalies très sérieuses existent un peu partout et plus particulièrement à Flamanville dans un EPR qui en principe devrait garantir une « exclusion de rupture » . Mais du constat à la décision il y a un écart insondable. Ainsi l’Etat ne tient guère compte de la situation alarmante du parc nucléaire et envisage dès l’été 2018 la construction de 6 réacteurs EPR, éclairé par un rapport opportun . Les annonces de Dominique Minière en janvier, présentées sur ce blog , sont donc déterminantes alors que la programmation pluriannuelle de l’énergie est en cours d’élaboration .

Comme toujours en France, la filière nucléaire sort grande gagnante des débats même quand elle n’a pas intéressé le public . Il faut dire que c’est le domaine réservé du Prince… et que ce Prince ne s’encombre guère de scrupules . La transition énergétique se fera grâce à l’atome. Non seulement le report de la baisse de la part du nucléaire à 50% du mixe électrique est confirmé, mais les énergies renouvelables sont l’objet d’un coup de frein sans précédent depuis le Grenelle de l’Environnement . La sécurité des approvisionnements, l’équilibre du réseau, la préservation du pouvoir d’achat, le développement des mobilités propres, etc. tout concourt à justifier le retour en grâce de la production nucléaire . Si des réacteurs seront mis à l’arrêt d’ici 2035, l’Etat prend clairement position en faveur du déploiement d’un renouvèlement du parc nucléaire grâce à des EPR aux dépends de la filière éolienne .

Ignorant les « dérapages » de Flamanville et le rapport accablant établi par Jean-Martin Folz , l’heure est à la relance du nucléaire au moyen de la construction de 3 paires d’EPR , des EPR low cost dont la faisabilité serait plus facile, le coût plus bas… en respectant le même référentiel de sûreté que le réacteur de Flamanville. Comme nous l’avons vu par ailleurs le tout pour une somme plutôt rondelette avoisinant les 50 milliards d’euros . Il n’aura pas fallu deux ans pour que l’Elysée confirme ce qui était présenté initialement comme une simple hypothèse . Même si cette décision ne satisfait pas pleinement un lobby nucléaire toujours prompt à revendiquer l’impossible , on est bien en présence d’un plan de relance qui prévoit la construction d’une bonne douzaine d’EPR sans que l’on sache clairement où ils pourraient être localisés ni même s’ils pourraient répondre à une demande d’électricité toujours croissante pour certains .

On est bien loin des débats de 2012 quand le plus grand nombre considérait comme nécessaire un rééquilibrage du mixe énergétique en faveur des ENR. L’argument climatique a sidéré l’ensemble des acteurs, d’aucuns renonçant à leur opposition ancienne à l’atome.

Mais si les décisions politiques passent les problèmes demeurent

Alors qu’EDF est occupé à résoudre les « anomalies » identifiées l’an passé, d’autres sont découvertes. « Début mai 2019, annonce d’une nouvelle anomalie générique sur les réacteurs nucléaire d’EDF : les tuyauteries - et finalement aussi les câbles - des groupes électrogènes, ces moteurs diesels censés servir de sources électriques de secours en cas de problème d’alimentation électrique, n’auraient pas résisté à un séisme pour cause d’interactions avec les structures environnantes . » Quelques semaines plus tard, l’Autorité de contrôle ordonne à EDF de reprendre les soudures des traversées de la double enceinte . La longue litanie des écarts et malfaçons se poursuit sans discontinuer. En juillet c’est au tour du chantier EPR de présenter de nouveaux écarts

A l’automne 2019, ce sont les deux anciens réacteurs de Flamanville qui tombent sous les feux de la critique. Là encore la corrosion fragilise les installations et amène l’Autorité de contrôle à exiger des travaux . Un exemple funeste qui confirme le constat amer établi par l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques dans un rapport relatif aux soudures de l’EPR publié le 26 septembre 2019 :

« Selon M. Doroszczuk, ces déficiences résultent « d’une défaillance industrielle globale de la chaîne de conception, de fabrication et de contrôle », s’agissant tant de la définition des exigences industrielles par Framatome et EDF, que de la qualité de réalisation des soudures par le sous-traitant.

L’ensemble de ces lacunes industrielles semblent être partiellement imputables à une « perte d’expérience » due à l’arrêt de la construction nucléaire en France pendant une longue période de temps, l’achèvement de la construction du dernier réacteur nucléaire français datant de la fin des années 1990. »

Si même les plus ardents partisans du recours à l’énergie nucléaire doutent, c’est bien qu’il existe un problème. Problème toujours plus profond, puisqu’en octobre, EDF est contrainte de déclarer des écarts sur pas moins de 16 générateurs de vapeurs dont la fabrication ne respecte pas le référentiel de sûreté . Une fois de plus le cours d’EDF s’effondre … Comment dans ces conditions envisager la poursuite de fonctionnement au-delà de 40 ans des réacteurs en exploitation ?

Toujours est-il que les écarts proviennent très clairement de chez Framatome touchant l’ensemble du parc, EPR compris . L’automne 2019 ne sourit pas EDF. Non seulement le chantier d’Hinkley Point c ne se passe pas au mieux entrainant lui aussi retards et surcouts mais la facture de l’EPR continue de grimper alors que la disponibilité des centrales reste consternante de l’aveu même de l’inspecteur général d’EDF :

Point significatif, les non-respects de spécifications techniques d’exploitation augmentent pour la seconde année consécutive. Un effort, notamment de formation, est indispensable. Les écarts de lignage sont à la hausse. Les durées d’arrêts de réacteur pour maintenance restent aussi une difficulté, qui témoigne d’une insuffisante maîtrise industrielle : préparation, planification pluriannuelle, compétences, etc.

Rien ne change en 2020, l’autorité de contrôle déplorant le manque de rigueur de l’exploitant . L’année s’ouvre par l’identification de nouveaux écarts sur les diésels de secours des réacteurs de 1 300 MWe . C’est à Flamanville que le spectacle est le plus édifiant . Le redémarrage des deux réacteurs est sans cesse repousser à mesure de nouvelles découvertes donnant à voir l’état de délabrement des installations . Plus globalement l’ensemble des centrales normandes présente des performances pour le moins perfectibles …

Rien ne va plus dans la filière nucléaire. Comme on pouvait s’y attendre le démarrage de l’EPR est repoussé en 2024 . Mais surtout l’autorité de contrôle se montre des plus sévères :

Le président de l’autorité de sûreté nucléaire s’est inquiété que chez EDF, un recul de la rigueur d’exploitation de ses centrales nucléaires ait été constaté, malgré des résultats de sûreté globalement satisfaisants. L’ASN a également noté une saturation des capacités d’ingénierie d’EDF.

L’ASN a pu observer ce recul au travers de plusieurs exemples :

Trois évènements significatifs ont été classés au niveau 2 en 2019 sur le parc nucléaire d’EDF contre zéro en 2018 ». Pour deux d’entre eux « des gestes et des décisions inadaptés des intervenants et le franchissement de lignes de défense en matière de sûreté » ont été constatés.

Lors de tests de mise en situation, il a été démontré que la documentation opérationnelle d’EDF n’était pas toujours adaptée « à la réalité du terrain » et « qu’elle contenait des erreurs ». Enfin, il a été détecté des non-conformités dans certaines de ces centrales « résultant de la mise en œuvre de modifications ou de maintenances insuffisantes ».

L’ASN estime donc qu’EDF doit faire un effort « pour renforcer la rigueur d’exploitation » .

Pas étonnant dès lors qu’une nouvelle anomalie soit repérée à Olkiluoto . Si le problème est complexe, il rappelle la difficulté d’intégrer technologies françaises et allemandes et surtout celle de qualifier des équipements conçus il y a près de trente ans au nouveau référentiel de sûreté post-Fukushima . La liste des défis auxquels EDF est confrontées ne cesse donc jamais de gonfler … au point que la Cour des Comptes rende un rapport des plus critiques .

EDF ne maitrise plus grand-chose tant en France qu’Outre-Manche . D’aucuns parlent d’un « déficit de culture de précaution » pour caractériser la gestion de l’exploitant nucléaire. A Flamanville, le redémarrage des réacteurs est une fois encore repoussé alors que la crise des groupes électrogènes de secours n’en finit pas …

Alors que la situation n’est pas glorieuse, le pire peut encore survenir...

Le plus drôle avec EDF c’est qu’on n’est jamais au bout de ses surprises. Ainsi à l’automne 2020, un nouveau problème pointe discrètement le bout de son nez. Un problème plutôt sérieux puisqu’il concerne des corrosions à l’intérieur même des circuits qui fragilisent l’ensemble des installations.

En juin 2020, le Journal de l’énergie révèle que la défaillance d’une soupape de de sûreté du pressuriseur du réacteur EPR d’Olkiluoto . Très rapidement il apparaît qu’il s’agit d’une anomalie majeure . L’Autorité de contrôle finlandaise demande le remplacement de ces équipements défaillants alors que son homologue française invite l’exploitant à se pencher sérieusement sur le problème. Non seulement le démarrage d’Olkiluoto est une fois de plus repoussé mais la facture s’annonce pour le moins salée . Et c’est peu de le dire. Un rapport établi par l’IRSN à l’attention du groupe permanent d’experts de l’ASN en charge des équipements sous pression donne à voir en novembre 2020 que ces fameuses corrosions sous contraintes si elles ne sont pas récentes, sont présentes un peu partout …

C’est bien évidemment à Flamanville sur les deux vieux réacteurs que le problème se manifeste en premier, les générateurs de vapeur présentant des traces de corrosion sous contrainte . Au tricastin les réacteurs ne sont pas épargnés selon une étude demandée par Greenpeace à Bernard Laponche . Le rapport de sûreté 2020 publié en mai 2021 ne peut esquiver le problème des corrosions :

Les zones en alliage à base de nickel

Plusieurs parties des REP sont fabriquées en alliage à base de nickel. La résistance de ce type d’alliage à la corrosion généralisée ou par piqûres justifie son emploi. Cependant, dans les conditions de fonctionnement des réacteurs, l’un des alliages retenus, l’Inconel 600, s’est révélé sensible au phénomène de corrosion sous contrainte. Ce phénomène particulier se produit en présence de contraintes mécaniques importantes. Il peut conduire à l’apparition de fissures, comme observé sur certains tubes de GV au début des années 1980 ou, plus récemment en 2011, sur une pénétration de fond de cuve du réacteur 1 de la centrale nucléaire de Gravelines et, en 2016, sur une pénétration de fond de cuve du réacteur 3 de la centrale nucléaire de Cattenom.

L’ASN revient sur l’incident survenu à Paluel fin 2019 et insiste sur les conséquences des corrosions du circuit primaire sur les générateurs de vapeur. « En effet, une dégradation du faisceau tubulaire (corrosion, usure, fissure, etc.) peut créer une fuite du circuit primaire vers le circuit secondaire. La rupture de l’un des tubes du faisceau conduirait à contourner l’enceinte de confinement du réacteur, qui constitue la troisième barrière de confinement. » Mais ce n’est pas la seule conséquence. L’accumulation de produits de corrosion entraine une dégradation globale des capacités de GV à garantir l’échange thermique indispensable à la sûreté. Tout cela est connu et fait partie des aléas normaux de l’exploitation d’un réacteur nucléaire. Faut-il encore que le phénomène ne soit pas trop important, qu’il soit maitrisé et surtout traité à la source…

Or c’est bien à ce niveau que le problème apparaît. En plus des causes connues de circulation de produits de corrosion, d’autres phénomènes accroissent sensiblement les quantités de produits de corrosion et affectent l’exploitation des réacteurs. C’est le cas à Civaux où des investigations poussées donnent à voir des corrosions sous contraintes de soudures du circuit d’injection de sécurité

Le gendarme du nucléaire précise que "les premières expertises métallurgiques réalisées sur les parties déposées des tuyauteries du réacteur 1 de la centrale de Civaux (ont) mis en évidence la présence de fissuration résultant d'un phénomène de corrosion sous contrainte", ce dernier étant généralement dû à l'action conjuguée d'une contrainte mécanique et d'un milieu agressif vis-à-vis du matériau .

Le sujet est d’autant plus sérieux que d’autres réacteurs sont très probablement touchés . Ca commence à faire beaucoup… au point que la Ministre demande à l’exploitant de lui communiquer un rapport sur la disponibilité du parc .

En tout cas on est bien en présence d’un problème notable au regard des nombreuses publications qui y sont consacrés en particulier par l’IRSN . Non seulement les réacteurs du palier N4 sont touchés mais aussi Penly 1 alors en visite décennale . Quelques semaines plus tard, l’Autorité de contrôle demande à l’exploitant d’approfondir ses investigations et de les étendre aux réacteurs 3 et 4 de la centrale du Bugey, au réacteur 3 de la centrale de Cattenom, au réacteur B3 de la centrale de Chinon et aux réacteurs 1 et 2 de la centrale de Flamanville . Ce sont donc 9 réacteurs qui seraient impactés par ces anomalies…

Franceinfo : Faut-il s'inquiéter de ces corrosions ?

Yves Marignac : Oui, il faut s'inquiéter. Ces corrosions concernent des microfissures apparues dans des coudes d'un circuit qui est indispensable au refroidissement de secours des réacteurs, si un réacteur se trouvait en situation accidentelle. Ces microfissures pourraient causer la rupture de ce circuit au moment même où on en aurait besoin. Cela veut dire que certains réacteurs pourraient être affectés par cette défaillance très grave .

Le 10 février, alors que le Président Macron annonce à grand renfort de communication la relance du programme nucléaire français à Belfort, il semblerait que tous les réacteurs de la centrale du Bugey sont eux-aussi touchés .

Si ce risque est connu depuis longtemps , il surprend en 2022 par son ampleur d’autant plus que « c’est un phénomène qui n’était pas attendu pour ce type d’acier à cet endroit et les causes de ces défauts ne sont pas aujourd’hui bien comprises . » Un phénomène qui ébranle la filière nucléaire française et qui amène l’exploitant à revoir ses prévisions de production non seulement en 2022 mais aussi en 2023 … d’aucuns redoutant un black out .

En effet la liste n’en finit pas de s’allonger. En avril, 4 autres réacteurs de 900 MWe connaîtraient eux aussi des corrosions sous contrainte laissant penser que l’ensemble serait bel et bien touché. Le 5 mai EDF confirme la présence de CSC sur 3 réacteurs . Les réacteurs les plus puissants seraient plus touchés . En tout cas on est bien en présence d’un effet du vieillissement qui n’a pas été anticipé par l’exploitant :

« A ce stade, ce problème n’est pas considéré comme un problème de vieillissement, a précisé le président de l’ASN. Il semble qu’il n’y ait que peu ou pas de fissurations détectées sur les 32 réacteurs de 900 mégawatts, mais cela reste à confirmer. » La façon dont ont été réalisées les soudures des tuyauteries apparaît comme un facteur de « second ordre », mais qui aurait néanmoins une certaine influence .

Tout y est. Les corrosions sous contraintes ne sont pas apparues soudainement. Elles relèvent à la fois d’un défaut de surveillance, de fragilités des équipements et d’opérations mal réalisées .

On comprend mieux la sévérité de Bernard Doroszczuk jusque-là plutôt bienveillant devant l’OPESCT en mai 2022. Il faut dire que le spectacle est consternant : le traitement des problèmes de corrosion sur les réacteurs d'EDF qui provoquent actuellement les mises à l'arrêt de 12 réacteurs sur 56. Si 35 soudures ont été étudiées par EDF, il en reste encore 105 à contrôler …

Pour autant le Gendarme du nucléaire a omis de rappeler un détail. Les corrosions sous contrainte que l’on observe aujourd’hui sont connues depuis bien longtemps :

C’est d’autant moins « inédit » que, dans le passé, la corrosion sous contrainte des aciers inoxydables de tuyauteries du circuit primaire a déjà frappé chez… EDF ! Le premier cas recensé dans un réacteur français par la littérature scientifique date en effet de 1984 et concerne le circuit RIS (injection de sécurité) du réacteur 3 de la centrale du Bugey dans l’Ain. Le même circuit que celui qu’EDF examine à la loupe (en fait aux ultrasons) depuis la « découverte » du problème à la centrale de Civaux durant l’été dernier…

Sur Bugey 3, le phénomène a été identifié et caractérisé dès le milieu des années 1980. Une thèse a été consacrée en 2004 aux fissures des aciers austénitiques. Les connaissances étaient donc là. Mais rien n’a été fait, l’exploitant prétextant la rareté de ces écarts pour ne pas agir …

Plus grave encore une enquête réalisée par Global Chance donne à voir que si le problème était connu, il a été renforcé par des opérations de maintenance réalisée en 1998 sans résoudre le phénomène . C’est bien l’exploitation du parc nucléaire qui est en cause et plus encore la capacité d’EDF à réaliser les opérations nécessaires pour garantir sûreté et radioprotection . Défaillance majeure de l’exploitant qui n’est même plus en capacité de mener correctement les chantiers mis en œuvre pour traiter les corrosions sous contraintes comme le donne à voir une inspection qui s’est déroulée le 30 mai . Le chantier a dû être arrêté au regard des multiples écarts constatés … les deux réacteurs de Penly se retrouvant à l’arrêt jusqu’en novembre !

Conclusion

Si les écarts se limitaient aux seules corrosions ce serait presque bien. Mais le mal est plus profond pour ne pas dire généralisé. Alors que chacun avait les yeux tournés vers les soudures défaillantes, un autre problème est apparu au cours du printemps 2022. EDF a installé des équipements non conformes sur 17 réacteurs sans résoudre le problème sensé être traité . Comment s’étonner dès lors que « l’Autorité de contrôle demande un Plan Marshall pour donner à la filière les moyens de ses ambitions » ?

Du côté des EPR ce n’est pas mieux. Les deux réacteurs de Taishan démarrés prématurément à grand renfort de communication sont touchés par le phénomène de fretting qui dégrade les gaines de combustible entraine des problèmes notoires pour la sûreté et la radioprotection . Problèmes d’autant plus grands qu’ils existent aussi en France et amènent à s’interroger sur la conception même des cuves EPR !

Somme toute le constat est sans appel. L’exploitant nucléaire ne sait plus ni construire ni entretenir des installations complexes, fragiles et dangereuses. La perte de compétence dénoncée depuis vingt ans en arrive à ruiner non seulement la sûreté des réacteurs mais leur disponibilité. Comment prétendre dès lors que le nucléaire soit une solution pour le climat ? Il ne peut même plus garantir la sécurité des approvisionnements pourtant requis par la loi…

Notes et commentaires

pour des raisons techniques les notes accompagnant l'article n'ont pu être intégrées.

Vous pouvez les consulter sur cette publication en ligne : https://fr.calameo.com/read/001574975c411a849275f